Les chutes
Editions Seuil : collection Points / 2006 : 551 pages
Ce roman a reçu le prix Fémina étranger en 2005
"Les chutes" est un roman que j'ai trouvé fascinant, j'avais lu « nous étions les Mulvaney » qui m'avait de la même manière impressionnée. Cette écrivaine a un réel talent pour emmener chacun de ses personnages jusqu'au fond de lui-même, au bout de ses limites. Joyce Carol Oates dissèque sous nos yeux chacune des personnalités de ce roman, elle ôte peu à peu toutes les couches qui font d'eux des êtres sociables, modelés par une éducation, un milieu social, un environnement... pour les mettre à nu. On découvre ainsi leur vrai visage, la nature même de leur caractère, de leur force et de leur fragilité.
Le 12 juin 1950, Ariah Littrell qui est une femme à l'existence plutôt banale va devenir en une nuit « la veuve blanche des chutes ». Son mari, le très sérieux révérend Gilbert Erskine traumatisé par sa nuit de noce s'est suicidé en se jetant dans les chutes du Niagara. Ariah, jeune femme timide et effacée va chercher son mari pendant sept jours et devenir une figure mythique des chutes du Niagara et fasciner un homme que tout lui oppose. Dirk Burnaby est un brillant avocat mais aussi un homme séduisant qui ne compte plus les conquêtes féminines. Ariah est à l'opposé de toutes les femmes que Dirk a l'habitude de fréquenter et pourtant il en tombe follement amoureux et c'est elle qui va devenir sa femme. Ariah va découvrir l'amour, la sécurité d'un foyer et la vie de famille. On pourrait croire à un happy end, mais les chutes sont là avec leurs histoires d'un autre temps : vieilles légendes indiennes, sacrifices humains, apparitions de la vierge, suicides, funambule. Mais aussi leurs histoires actuelles : veuve blanche, mystérieuse femme en noir, tourisme et industrialisation à outrance.
Les chutes ont-elles le pouvoir de rendre riche, de rendre fou, les gens qui les approchent ? Est-ce une malédiction qui s'est réellement abattue sur la famille Burnaby ? Ou est-ce le pouvoir de l'argent qui peut à lui seul tout détruire sur son passage ?
Avec ce roman, Joyce Carol Oates fait une analyse très fine de la société américaine et dénonce le fonctionnement d'une justice au service du pouvoir et de l'argent.
Un roman très dense, foisonnant, intelligent et superbement bien écrit : un excellent roman de vacances car il nous entraîne à lire tard dans la nuit.
En 1900, à la consternation de ses habitants et des promoteurs d'une industrie touristique florissante, Niagara Falles avait acquis la réputation de "paradis du suicide". "Extrait de la
page de garde de "les chutes".