Liberté conditionnelle
Lu dans le cadre du Challenge Dragon organisé par Catherine
Editions Actes - Sud : collection Lettres japonaises
2001 / 295 pages
Il y a des livres qui nous offre un véritable bonheur de lecture et je peux dire que ce roman en fait partie.
J'ai aimé l'extrême justesse avec laquelle l'auteur a aborder ce thème : la réinsertion sociale des criminels. Comment raconter, expliquer, voir justifier un geste aussi fatal que celui de tuer. Akira Yoshimura nous emmène tout doucement, dans les méandres d'un esprit torturé par la jalousie et la vengeance, qui ne pourra jamais pardonner, ni s'excuser.
Kikutani le héros de cette histoire va sortir en liberté conditionnelle, après 15 ans de prison alors qu'il est condamné à perpétuité. Il est pris en charge à sa sortie par un tuteur qui va l'aider à se réinsérer dans la société.
Kikutani a beaucoup de mal à retrouver une existence normale. Son passé le poursuit, le hante. Il sait qu'il ne pourra pas redevenir "l'homme d'avant". Le professeur de japonais dans un lycée de jeunes filles, un homme reconnu et respecté. En 15 ans, le japon est devenu un pays extrêmement moderne. Il le savait par la télévision qu'il regardait dans sa cellule. Mais la réalité est beaucoup plus violente. Il va lui falloir beaucoup de temps et l'aide de ses tuteurs pour reprendre une existence indépendante.
Le livre est entièrement construit autour de la réinsertion sociale de Kikutani. Ce qui est très intéressant dans ce roman c'est que nous savons ce qui se passe dans sa tête, ses angoisses, ses peurs, ses inquiétudes et surtout le souvenir de ses crimes. Ce passage à l'acte monstrueux qui a fait du petit professeur sans histoire, un criminel. On sait aussi que malgré les années de prison, il n'a pas pardonné à ceux qu'il a tués. Froid, déterminé, il ne regrette pas son geste. Alors même si Titukani comme pendant ses années de prison est un homme calme, discipliné qui semble avoir une vie exemplaire, le lecteur sait que ce n'est pas le cas. Il est toujours hanté par l'affront qu'il a subi. Kikutani a une personnalité attachante, ses tuteurs sont trop confiants, ils se rassurent même en trouvant des circonstances atténuantes à son crime et décident malgré lui d'accélérer sa réinsertion en lui proposant de se remarier........
Ce roman nous offre un regard réaliste presque glaçant de l'âme humaine, tout en nous proposant une promenade enrichissante à travers la société japonaise : le travail, les transports en commun, les repas, la condition féminine......
Un roman que l'on n'oublie pas, car ils nous concernent tous.
Extrait de la page 172 :
Il lui semblait que quelque chose d'inconnu était tapi au fond de lui. Etait-ce ce qui avait produit la couleur rouge dont il avait été assailli ? C'était cette couleur éclatante qui l'avait poussé à tuer, il ne trouvait rien d'autre, et c'était impossible à expliquer logiquement à quelqu'un, dans la mesure où lui-même ne le comprenait pas. Tout etait vague, la seule chose certaine étant qu'il n'avait aucun regret, qu'il était même persuadé d'avoir accompli une bonne action.