Richard Millet : La gloire des Pythre
Le roman régionaliste est
né au début du XIXème siècle, et n’a cessé d’évoluer. Il y a eu tout d’abord la vision romantique du monde paysan décrite par exemple
dans les romans de George Sand, puis d’autres courants comme le « courant réaliste » où Emile Zola dépeint avec « La terre » un monde rural bien loin de l’univers bucolique de George Sand et dresse un portrait
peu flatteur du monde paysan.
A notre époque le roman régionaliste a toujours autant d’attrait, on peut le constater en limousin avec la création de « l‘école de Brive». Ces romans utilisent souvent la même recette : une saga familiale qui commence au début du siècle et raconte les mutations du monde agricole, les conséquences de la guerre, souvent écrits sous une forme romanesque et populaire.
Les auteurs les plus connus dans la région limousin sont Claude Michelet, Christian Signol….
Pour jeter une touche réaliste dans ce monde bucolique nous avons comme au XIXème siècle un écrivain qui lance un énorme pavé dans cette mare de bons sentiments : Richard Millet.
La gloire des Pythre - Gallimard collection Folio - 384
pages.
Quand l’écriture puissante et littéraire de Richard Millet rencontre le monde paysan cela donne un chef d’œuvre.
Ce roman est d’un réalisme suffocant presque dérangeant puisque dés les premières pages, Richard Millet nous plonge dans l’univers de la mort et de son insupportable odeur, de sa puanteur, qui devient quelques mois par an, l’horreur au quotidien de ce petit village corrézien coupé du monde. En effet les villageois sont obligés d’attendre que l’hiver se termine afin que les chemins redeviennent praticables et ainsi enterrer leurs morts dans les villages voisins. En attendant, ils les entreposent dans une cabane montée sur pilotis.
« Nous n’avions pas le droit , à Prunde, d’ensevelir nos morts. Ni église, ni mairie, ni école : (…)
Ce village est celui d’André Pythre âgé de douze ans et dont la jeune mère vient de mourir. Cette odeur de mort va lui coller à la peau toute sa vie. C’est la destinée et la descendance de ce jeune orphelin que l’on va suivre à travers trois générations de la famille Pythre.
Avec l’histoire de cette famille, on parcourt la vie rurale du début de XIXe siècle jusqu’à la fin des années 60 dans les petits villages isolés du limousin. Les conditions de vie et d’hygiène y sont précaires, les relations entre les hommes et les femmes inexistantes, et comme l’ordre social repose sur un « patriarcat absolu » la condition des femmes y est inhumaine.
La famille des Pythre est le portrait d’une famille de paysans du début du siècle où l’éducation se faisait uniquement en répétant les mêmes gestes que les ainés, où la parole était rare mais la violence omniprésente.
Pour voir apparaître une lumière d’humanisme, de civilité, dans ces cerveaux obscurcis par le travail harassant et le manque d’hygiène, il va falloir attendre plusieurs générations.
Richard Millet nous dresse là le portait d’un monde qui n’existe plus mais qui est encore présent dans nos mémoires, nous avons tous dans nos familles un grand-père, une arrière grand-mère… qui nous a racontés des histoires qui ressemblent à celle de la famille des Pythre.
J’ai adoré ce roman qui m’a fait découvrir un auteur que je n’avais pas envie de lire….il n’y a que les idiots qui ne changent pas
d’avis !!
Si vous voulez un autre avis celui d'une libraire qui a un blog très intéressant est à lire